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Qui n’a jamais eu à gérer un collègue difficile ? Cette réalité touche la grande majorité des salariés : 85 % d’entre nous ont déjà fait face à cette situation selon Workplace Options. Et les conséquences ne sont pas anodines. L’INRS place les relations conflictuelles au travail en deuxième position des facteurs de stress professionnel, juste après la surcharge de travail.

Peut-être reconnaissez-vous certaines situations : ce collaborateur talentueux qui ignore systématiquement les procédures, ce collègue qui répond de manière agressive à la moindre remarque, ou encore ce membre de l’équipe qui refuse toute forme de collaboration… Comment gérer ces comportements sans perdre son calme ni créer de conflit ouvert ?

La bonne nouvelle ? Des solutions existent. Des spécialistes du management et des psychologues du travail ont développé des méthodes qui ont fait leurs preuves. Dans cet article, découvrez 5 stratégies concrètes pour transformer une relation professionnelle tendue en collaboration constructive. Du recul nécessaire à la pose de limites, suivez le guide !

Comprendre les différents profils de collègues difficiles : une étape essentielle

Avant de réagir face à un collègue difficile, prenons le temps de comprendre les différents profils que l’on peut rencontrer. Cette étape, souvent négligée, s’avère pourtant cruciale pour adopter la bonne stratégie.

Les principaux types de collaborateurs difficiles

Les experts en management identifient plusieurs profils récurrents :

  • Le “rule-breaker” : ce collaborateur, souvent talentueux, considère que les règles et procédures ne s’appliquent pas à lui. Exemple ? Ce designer qui refuse systématiquement de suivre le processus de validation, persuadé que son talent justifie cette liberté.
  • Le “négatif chronique” : celui qui critique tout, tout le temps. D’après une étude de la Harvard Business Review, un seul collaborateur toxique peut faire chuter la productivité d’une équipe de 30 à 40 %.
  • Le “non-communicant” : il garde les informations pour lui, répond aux mails trois jours plus tard et évite les réunions. Une enquête Slack révèle que 86 % des employés citent le manque de collaboration comme principale cause d’échec des projets.
  • L'”agressif passif” : expert en remarques assassines et en sous-entendus, il crée des tensions sans jamais être ouvertement en conflit.

Zoom sur le “rule-breaker”

Le cas du “rule-breaker” mérite une attention particulière. Pourquoi ? Parce que ce profil présente un paradoxe intéressant : souvent performant individuellement, il peut mettre en péril l’efficacité collective.

Ses caractéristiques typiques :

  • Excellent dans son domaine d’expertise
  • Confiant, parfois jusqu’à l’excès
  • Créatif et innovant
  • Réfractaire aux contraintes
  • Persuadé que les résultats justifient les moyens

L’impact sur l’équipe et l’entreprise

Les comportements difficiles ont des répercussions qui dépassent largement la simple relation interpersonnelle :

  • Baisse de la productivité : selon une étude Gallup, un collaborateur toxique peut mobiliser jusqu’à 80 % du temps de son manager en gestion de conflits.
  • Dégradation de l’ambiance : l’effet de contagion est réel. Une personne qui ne respecte pas les règles peut encourager d’autres à faire de même.
  • Risques pour l’entreprise : dans certains cas, le non-respect des procédures peut exposer l’organisation à des risques légaux ou réputationnels.
  • Surcharge pour les autres : les collègues doivent souvent compenser, corriger les erreurs ou gérer les conséquences des comportements problématiques.

Stratégie 1 : prendre du recul pour mieux analyser la situation

Face à un collègue difficile, notre première réaction ? Souvent l’agacement, parfois la colère. “Il le fait exprès”, “il ne pense qu’à lui”, “il n’en fait qu’à sa tête”… Ces jugements, aussi naturels soient-ils, peuvent nous empêcher d’agir efficacement.

L’erreur d’attribution fondamentale : un piège à éviter

Les psychologues du travail mettent en garde contre un biais cognitif répandu : l’erreur d’attribution fondamentale. De quoi s’agit-il ? De notre tendance à surestimer les facteurs personnels (caractère, personnalité) et à sous-estimer les facteurs externes (contexte, situation) dans l’explication des comportements d’autrui.

Exemple concret : votre collègue ne respecte pas les délais de reporting. Votre première pensée ? “Il est négligent”. Mais peut-être fait-il face à :

  • Une surcharge de travail imprévue
  • Un outil de reporting peu ergonomique
  • Un manque de formation sur les procédures
  • Des objectifs contradictoires fixés par sa hiérarchie

Comment prendre du recul efficacement ?

Pour éviter les jugements hâtifs, voici une méthode en trois temps :

  1. Observer avant d’interpréter
  • Notez les faits précis : quand, comment, à quelle fréquence ?
  • Distinguez les faits de vos interprétations
  • Documentez les situations problématiques
  1. Analyser le contexte global
  • Quel est l’environnement de travail ?
  • Quelles sont les pressions existantes ?
  • Y a-t-il eu des changements récents ?
  1. Questionner vos propres réactions
  • Pourquoi ce comportement vous affecte-t-il particulièrement ?
  • Vos attentes sont-elles réalistes ?
  • Votre propre stress influence-t-il votre perception ?

Des questions clés à se poser

Pour faciliter cette prise de recul, posez-vous systématiquement ces questions :

  • Ce comportement est-il vraiment dirigé contre moi ou l’équipe ?
  • Est-ce un problème ponctuel ou récurrent ?
  • D’autres collègues perçoivent-ils la situation de la même façon ?
  • Quelles sont les compétences et qualités de ce collègue, malgré ses défauts ?

Le rôle du stress dans les comportements difficiles

Une étude de l’ANACT révèle que 67 % des comportements problématiques au travail sont liés au stress. Avant de cataloguer un collègue comme “difficile”, considérez :

  • Sa charge de travail actuelle
  • Les changements récents dans sa vie professionnelle
  • Les éventuelles pressions qu’il subit
  • Son équilibre vie professionnelle-vie personnelle

 

Stratégie 2 : initier un dialogue constructif

Comment aborder un collègue difficile sans déclencher une tempête ? Tout se joue dans l’art du dialogue. Voici les techniques qui ont fait leurs preuves.

Le choix du moment : un facteur clé de succès

Ne sous-estimez pas l’importance du timing. Une étude de l’Institut de Gestion des Conflits montre que 40 % des discussions professionnelles délicates échouent à cause d’un mauvais timing.

Privilégiez :

  • Un moment calme de la journée
  • Une période où votre collègue n’est pas sous pression
  • Un créneau suffisamment long pour ne pas être interrompu
  • Un jour où vous êtes vous-même serein

À éviter absolument :

  • Les lundis matins et vendredis après-midi
  • Les périodes de rush
  • Les moments qui suivent un incident
  • Les discussions “sur le vif” dans un couloir

 

Les techniques d’écoute active : votre meilleur allié

L’écoute active n’est pas une simple formule à la mode. C’est un outil puissant qui permet de :

  • Créer un climat de confiance
  • Comprendre le point de vue de l’autre
  • Désamorcer les tensions

Comment la pratiquer ?

  1. Adoptez une posture ouverte
  2. Maintenez un contact visuel approprié
  3. Utilisez des signes non verbaux d’écoute (hochements de tête)
  4. Reformulez régulièrement

Les questions qui ouvrent le dialogue

Voici des exemples de questions efficaces :

  • “J’ai remarqué que… Peux-tu m’aider à comprendre ?”
  • “Comment pourrions-nous améliorer cette situation ensemble ?”
  • “Qu’est-ce qui te permettrait de mieux suivre ce processus ?”
  • “Quelles difficultés rencontres-tu avec cette procédure ?”

À bannir :

  • “Pourquoi tu ne respectes jamais les règles ?”
  • “Tu fais exprès de compliquer les choses ?”
  • “Tu ne penses pas aux autres ?”
  • Toute question commençant par “pourquoi” (trop accusateur)

La technique DESC : un outil structuré pour communiquer

La méthode DESC (Décrire, Exprimer, Spécifier, Conséquences) est particulièrement efficace :

  1. Décrire les faits objectivement “Quand les rapports ne sont pas remplis dans le CRM…”
  2. Exprimer son ressenti “Je me retrouve en difficulté pour suivre l’avancement des projets…”
  3. Spécifier ses attentes “J’aimerais qu’on trouve ensemble une façon de tenir le reporting à jour…”
  4. Conséquences positives “Cela nous permettrait d’être plus efficaces et de gagner du temps.”

Les phrases qui désamorcent les tensions

Exemples de formulations positives :

  • “Je comprends ton point de vue sur…”
  • “Tu as raison quand tu dis que…”
  • “Et si on essayait de trouver une solution qui nous convienne à tous ?”
  • “Qu’est-ce qui te semblerait réalisable ?”

Stratégie 3 : expliquer l’importance des règles et des processus

Pourquoi certains collaborateurs brillants ignorent-ils les règles ? Souvent parce qu’ils n’en comprennent pas l’utilité. L’enjeu ? Transformer des contraintes apparentes en outils de réussite collective.

Au-delà des “il faut” : expliquer le pourquoi

Les règles ne sont pas arbitraires. Une étude Deloitte révèle que 73 % des employés respectent mieux les processus quand ils en comprennent la finalité.

Exemples concrets à partager :

  • “Le reporting hebdomadaire permet d’anticiper les blocages et d’éviter les urgences de dernière minute”
  • “La validation en plusieurs étapes a évité 60 % des reprises sur nos derniers projets”
  • “Grâce aux process qualité, nos réclamations clients ont diminué de moitié”

L’approche pédagogique : des bénéfices pour tous

Montrez les avantages directs pour votre collègue :

  • Gain de temps à long terme
  • Moins de corrections à faire
  • Reconnaissance de son travail
  • Meilleure visibilité sur ses réalisations
  • Protection en cas de problème

Les bénéfices collectifs :

  • Collaboration plus fluide
  • Moins de stress d’équipe
  • Résultats plus prévisibles
  • Ambiance de travail plus sereine

Comment expliquer sans condescendance ?

Évitez ces erreurs courantes :

  • Le ton moralisateur
  • Les menaces voilées
  • La comparaison avec d’autres collègues
  • Les rappels constants au règlement

Privilégiez plutôt :

  • Le partage d’expérience
  • Les exemples concrets
  • Les données chiffrées
  • Les témoignages positifs

La technique du “storytelling professionnel”

Racontez des histoires vraies qui illustrent l’importance des règles :

  • Un projet sauvé grâce au respect des procédures
  • Une crise évitée grâce aux processus de validation
  • Des gains financiers liés au respect des normes

Exemple : “Tu te souviens du projet X ? La revue qualité nous a fait gagner une semaine en identifiant un problème majeur dès le début.”

Stratégie 4 : proposer des solutions flexibles et adaptées

Rigidité et efficacité ne font pas bon ménage. L’art du management moderne ? Savoir adapter les processus sans en perdre l’essence. Une étude McKinsey montre que les entreprises qui savent conjuguer rigueur et flexibilité sont 25 % plus performantes.

La recherche du compromis intelligent

Comment assouplir sans dénaturer ?

Les adaptations possibles :

  • Simplifier les procédures trop lourdes
  • Raccourcir les circuits de validation
  • Proposer des formats alternatifs
  • Adapter les horaires de réunions
  • Personnaliser les outils de reporting

Exemples concrets :

  • “Au lieu d’une réunion quotidienne, faisons un point rapide trois fois par semaine”
  • “Je te propose un template simplifié pour tes rapports”
  • “On peut regrouper tes validations le lundi plutôt que de les espacer”

La méthode test & learn

Mettez en place une période d’essai :

  1. Définissez clairement l’adaptation proposée
  2. Fixez une durée test (1 mois généralement)
  3. Établissez des critères d’évaluation
  4. Prévoyez des points d’étape

Indicateurs à surveiller :

  • Respect des nouveaux processus
  • Qualité du travail produit
  • Satisfaction de l’équipe
  • Gains de temps réels
  • Impact sur les résultats

Les limites de la flexibilité

Attention : certains points restent non négociables

  • Les obligations légales
  • Les normes de sécurité
  • Les impératifs clients
  • Les deadlines critiques
  • Les standards qualité essentiels

L’approche “petit pas”

Une étude de l’ANDRH révèle que 80 % des changements réussis commencent par de petites adaptations :

  1. Identifiez les irritants majeurs
  2. Proposez des ajustements mineurs
  3. Testez rapidement
  4. Ajustez en fonction des retours
  5. Validez avant de passer à l’étape suivante

Stratégie 5 : savoir rester ferme quand c’est nécessaire

Flexibilité ne signifie pas laxisme. Dans certaines situations, la fermeté s’impose. Mais comment rester professionnel tout en posant des limites claires ?

Poser un cadre non négociable

Selon une étude du Boston Consulting Group, les équipes les plus performantes combinent souplesse et règles claires. Les points qui ne se négocient pas :

  • Les obligations légales et réglementaires
  • Les normes de sécurité
  • Les deadlines critiques pour l’entreprise
  • Les procédures essentielles au bon fonctionnement collectif

Les techniques d’affirmation professionnelle

Comment dire “non” sans créer de conflit :

La méthode du disque rayé :

  • Restez calme et factuel
  • Répétez votre position sans agressivité
  • Utilisez toujours les mêmes mots Exemple : “Je comprends ton point de vue, mais cette validation est obligatoire pour des raisons de sécurité.”

Le “non” constructif :

  • Reconnaissez la demande
  • Expliquez le refus
  • Proposez une alternative Exemple : “Je vois que tu veux aller vite. Malheureusement, je ne peux pas contourner cette étape. En revanche, je peux accélérer la validation.”

La documentation des incidents

Gardez une trace écrite :

  • Des écarts répétés
  • Des conversations importantes
  • Des accords convenus
  • Des impacts sur l’équipe

Pourquoi ?

  • Protection juridique
  • Suivi objectif
  • Base factuelle pour les entretiens
  • Aide à la prise de décision

L’escalade hiérarchique : quand et comment ?

Selon une enquête Ifop, 65 % des managers hésitent trop longtemps avant d’alerter leur hiérarchie. Les signaux qui justifient une escalade :

  • Comportements répétés malgré les alertes
  • Impact significatif sur l’équipe
  • Risques pour l’entreprise
  • Blocage total du dialogue

Comment faire remonter ?

  1. Préparez un dossier factuel
  2. Proposez des solutions
  3. Restez professionnel
  4. Évitez les jugements personnels

Maintenir le professionnalisme

Même dans la fermeté :

  • Gardez votre calme
  • Restez factuel
  • Évitez les menaces
  • Concentrez-vous sur les comportements, pas la personne
  • Laissez la porte ouverte au dialogue

Gérer un collègue difficile : alors, en résumé, on fait comment ?

Gérer un collègue difficile demande du temps, de la patience et une approche structurée. Les cinq stratégies que nous avons détaillées forment une méthode complète pour transformer une relation professionnelle tendue en collaboration constructive :

  1. Prendre du recul pour analyser objectivement la situation
  2. Initier un dialogue constructif et sincère
  3. Expliquer l’importance des règles plutôt que les imposer
  4. Proposer des solutions flexibles quand c’est possible
  5. Rester ferme quand la situation l’exige

La clé du succès ? L’équilibre entre fermeté et flexibilité. Comme le souligne une récente étude Gallup, les équipes qui parviennent à maintenir cet équilibre voient leur productivité augmenter de 21 %.

N’oubliez pas : un collègue “difficile” est souvent quelqu’un qui traverse lui-même des difficultés. En adoptant une approche constructive et professionnelle, vous contribuez non seulement à améliorer votre environnement de travail, mais aussi à développer des compétences managériales précieuses.

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